mardi 9 juillet 2013

« Le Seigneur c’est le Souffle, et où est le Souffle du Seigneur est la liberté » 2Corinthiens 3,17.

RRDT
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                   
Alain est parti, mais ne nous a pas quittés. 
Il est parti au début de l’année nouvelle, comme en fermant la porte à l’ancien, et laissant grande ouverte, et pleine de possibilités, la porte de la nouveauté. Lui qui usait avec maestria du langage symbolique, qui est le langage de la conscience, la poésie de l’âme (dans L’Alphabet des Commencements, il avait écrit que le langage poétique – de la poésie véritable – est le seul langage véritablement scientifique), je pense aujourd’hui qu’il a tout donné, jusqu’à l’extrême limite, pour qu’il en soit ainsi……….  Exactement ainsi, comme son propre travail, comme la poésie de sa science, comme la science de sa poésie.



Je le pense maintenant, toujours en pleurant à chaque fois que je pense à lui, parce que jusqu’à ce que Françoise nous appelle pour nous annoncer la nouvelle, j’avais toujours cru qu’il se remettrait. La part irremplaçable de son enseignement, unie à l’intimité de son amitié est pour moi comme la lumière du printemps, et des automnes, trop chérie, trop intime pour supporter les hivers sans son souvenir ni sans son espérance. Je ne peux pas revivre ce souvenir sans cette espérance. Cette espérance n’a pas la même profondeur sans son souvenir. Pour cela Alain nous a laissés en ouvrant au milieu de l’hiver la porte de l’an neuf, pour que nous cherchions, enquêtions, grandissions, investiguions, décodions les signes d’une espérance renouvelée, plus vraie en ce sens qu’il n’y a ni coupure ni séparation entre le monde printanier où se manifeste la Lumière véritable, et le monde automnal où il nous a appris à la déposer, à la recueillir.

Est venu un silence, un silence énorme comme le silence qui pouvait venir avec son départ, qui m’a poussé à écrire un court texte, à peine trois traits d’esquisse, à peine une photo.





Le second trait que je voudrais mentionner est qu’avec Alain, la photographie revenait à son origine, mais à son origine étymologique, qui est écriture (graphos) de Lumière (photo). Cela revenait à être, comme au début de l’évangile de Jean, un dialogue. Parfois c’est la lumière qui nous écrit. Parfois c’est nous, comme le témoin – l’homme appelé Jean – qui écrivons. Ainsi advient quelque chose qui est un art objectif – une science de la conscience – qui tient beaucoup d’une forme passionnante de méditation. Pour cela il est si difficile de nommer le travail qu’il a fait et partagé avec nous. Il résistait à donner un nom définitif. Parfois cela paraissait de la théologie, parfois de la linguistique, ou encore de la psychologie, fréquemment de l’ART, parfois de la guérison. C’était toujours de l’écriture de lumière, mais écriture dialogique, de Lumière vivante, de Lumière de Lumière.

Le troisième trait est que grâce à lui en premier lieu, mais aussi grâce au groupe de personnes qui l’ont accompagné et soutenu de façon inconditionnelle, Alain Masson a pu poursuivre ce travail dans une liberté continue et surprenante, en ces temps d’esclavage parfois brutal, plus subtil à d’autres moments, en payant un fort prix pour cela. Affranchissement des catégories, libération des hypothèques, sans feinte, formalisme ou institutions, libre des structures et par-dessus tout, de dogmatisme.

Cela lui a accordé la liberté, et de là le mouvement. Et lui a demandé (et nous demande à nous tous) à son tour un si grand sens de responsabilité, ce qui veut dire tant de responsabilité du sens.



La Lumière qui écrivait à Alain, et celle qu’écrivait Alain est Lumière de Liberté, qui nous donne, grâce au dynamisme de son mouvement, au début une grande soif de liberté, puis quand nous nous familiarisons avec elle, une grande sensation de liberté, un grand sentiment de liberté, une grande liberté de pensée, une parole libre. C’est pour cela qu’il insistait autant sur le mouvement. Pour cela il évitait de jamais se répéter, pour cela il était un initié, ce qui veut dire celui qui est  toujours dans un commencement, et pour cela chaque commencement était encore plus nouveau, plus surprenant, c’est-à-dire plus original. Pour cela c’est la Lumière véritable, parce qu’elle est véritablement Lumière, Lumière vivante, même quand, pour s’approcher de nous elle permettait par amour que nous la notions sur le papier. Pas pour l’enfermer, mais pour ouvrir la prison de papier et la remplir de possibilités neuves, insoupçonnées, comme la première feuille du premier jour du calendrier neuf de l’année nouvelle, en ce jour de l’année où, sans nous laisser, simplement en marchant devant nous en éclaireur, Alain Masson s’en va.

Sans nous laisser. Simplement pour qu’en nous rencontrant, nous le rencontrions de nouveau.

Txepetx.

Josse, le 11 janvier 2010.







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