Quelques semaines avant de partir, Alain avait écrit
un dernier texte intitulé
Le lever de l’aurore
pour ses amis et ses enfants, en témoignage.
Le lever de l’aurore
pour ses amis et ses enfants, en témoignage.
En voici quelques
phrases :
"Le temps de la nuit n’est pas le temps de l’aube
et le temps de l’aube n’est pas le temps de l’aurore.
Pour nous, humains d’aujourd’hui,
le seul temps réel, c’est celui de la nuit.
L’aube, nous pouvons parfois la pressentir.
Nous sommes complètement aveugles au temps de l’aurore.
L’aurore est là. Nous ne la voyons pas.
Le temps de la nuit est une construction récente.
Le temps de la nuit, c’est celui de la vie des esclaves.
Être un esclave, c’est vivre en nuit.
On tombe dans le temps de la nuit. C’est une chute.
On ne sait pas ce qui arrive.
Par définition, l’esclave perd conscience de lui-même.
Obscurcissement.
Nous en sortirons
en retrouvant en nous les grands espaces de liberté
qui nous sont nécessaires.
Les grands espaces dont nous avons la nostalgie
ne sont pas géographiques.
Le temps des terres vierges est passé.
Il ne reviendra pas.
Les nouveaux mondes sont des terres qui n’existent pas
encore.
Territoires mythiques, plus vrais que des cartes.
L’acte de bénédiction crée ces mondes tout neufs,
infinis
Bénir, c’est un acte, une parole juste ; c’est bien
dire.
Toute parole prononcée dans son souffle fait surgir des îles
fleuries.
Il a versé son sang pour que nous puissions bénir
Et pour, qu’en bénissant, nous puissions respirer,
respirer le souffle de liberté.
Quand il bénissait le repas, quand il l’illuminait,
il y avait comme un basculement du temps,
un changement de point de vue subtil et péremptoire,
un frisson d’espérance, une rafale de bonheur.
Pour entrer dans le temps de l’aube,
pour sortir définitivement du temps de la nuit,
la clé, c’est l’acte de bénir."
BENIR
BENIR
"Seigneur,
Nous
te rendons grâce pour la vie d’Alain.
Nous
te rendons grâce aussi pour sa mort.
Il
est mort comme il l’avait souhaité.
En
toute conscience.
Assis,
la tête droite.
Dans
nos bras.
Par
une belle nuit éclairée de lune.
Tu le
sais, c’est en pleine conscience
qu’Alain
a traversé.
C’était
un beau passage.
Attendre,
corps et âme, d’être prêt.
L’attente
du corps est si douloureuse
puis
vient le moment juste
pour
l’acte juste.
Le
passage.
Seigneur,
Nous
te rendons grâce.
Au
moment du passage d’Alain,
dans
cet accompagnement,
tu
nous as remplies de confiance et d’amour.
Nous
avons respiré avec Alain,
puis
peu à peu c’est toi qui as respiré avec lui.
Alain
est passé doucement et paisiblement
de la
respiration au souffle.
C’est
comme une musique
que
l’on entend de moins en moins avec les oreilles
parce
qu’elle résonne dans une autre dimension.
La
petite chambre vibre de lumière.
Notre
cœur déborde d’un immense amour.
Puis
ce sera l’aube.
J’irai
chercher des feuillages
pour
un bouquet.
Je
marcherai sur la terre bruissante de gelée blanche
en
regardant l’étang respirer le jour naissant.
Et je
te dirai, Dieu d’Amour,
Merci.
Amen"
(Hélène, janvier 2010)
(Hélène, janvier 2010)
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